30e Journées d'histoire du management et des organisations

    Les effets des entreprises capitalistes sur l'environnement en zone littorale

Appel à articles

JHMO et Entreprises & Histoire

 

Dans le cadre des 30èmes Journées d’Histoire du Management et des Organisations

« Les effets des entreprises capitalistes sur l’environnement en zone littorale »

La notion de capitalisme a été au cœur de nombreux débats d’économie et d’histoire économique au cours du XXe siècle. Elle a longtemps été associée à une notion de progrès, la recherche d’une forme d’accumulation correspondant à une amélioration considérable de la situation matérielle des humains au cours des deux derniers siècles. Mais le capitalisme correspond aussi à une imbrication entre cette recherche d’accumulation (ou dit plus simplement de profit) et une valorisation sociale de ces comportements. François et Lemercier (2021) notent ainsi : « dans ces sociétés où l’orientation vers le profit pour lui-même est centrale et largement légitimée, une tendance à l’accumulation de capital apparaît donc. Ces sociétés sont aussi très conflictuelles, précisément parce que tous peuvent y rechercher légitimement le profit ».

Les modalités de développement historique ont été nombreuses, et une économie de marché libre en semble la modalité la plus évidente. Dans ce cadre, le poids des entreprises dans le capitalisme libéral a été primordial et cet appel est une invitation à en rendre compte. Néanmoins, d’autres modalités ont existé comme celles mêlant intervention de l’État et économie de marché (du colbertisme à l’économie planifiée de l’après 1945) ou encore dans les ex-pays communistes avec un capitalisme d’État.

L’effondrement d’une grande partie des pays communistes à la fin des années 1980 et au début des années 1990 et l’expansion économique liée à la mondialisation ont contribué à faire disparaître les débats autour du capitalisme. La question environnementale a contribué à en faire naître de nouveaux (Worster 1990). Dans la suite de l’hypothèse de l’anthropocène avancée par Crutzen, l’idée d’une responsabilité particulière de l’activité économique capitaliste et donc des entreprises dans les bouleversements environnementaux a contribué au développement d’une notion spécifique, le capitalocène (Caffentzis 1980/2013, Burkett 1999, Altvater 2006, Weissenbacher 2009, Bonneuil and Fressoz 2013, Moore 2017). Dans une perspective critique, ces travaux soulignent la responsabilité du capitalisme dans la destruction de l’environnement. Ils ouvrent ici une première perspective de cet appel, celui de documenter l’impact historique d’entreprises capitalistes sur l’environnement, invitant à des approches mêlant histoire économique et histoire environnementale. Cet appel est aussi une invitation à proposer des exemples historiques montrant comment le développement d’entreprises ou d’activités capitalistiques a pu avoir un impact environnemental positif.

Cet appel à articles se situe à l’intersection de l’histoire et des sciences de gestion. Il peut s’envisager de deux façons :

-        En montrant comment le développement de certaines activités économiques ou d’entreprises a eu un impact sur l’environnement en général (Frioux et Bécot, 2022). Les zones littorales figurent parmi les espaces les plus affectés par les enjeux environnementaux et les activités économiques. Cette approche est essentielle pour comprendre comment les pratiques économiques passées ont façonné et continuent d'influencer l'état des zones côtières. Une telle recherche pourrait offrir des perspectives précieuses pour les décideurs, les entreprises et les communautés locales en quête de solutions équilibrées et respectueuses de l'environnement. Le contexte littoral de la Rochelle est une invitation à explorer plus particulièrement deux activités économiques particulières :

 

  • Les activités portuaires : si on dispose de travaux sur les économies portuaires (Marnot, 2011, Eck, Tilly et Touchelay 2016 ou Bartolotti, Daumalin et Raveux 2022), on dispose encore de peu de travaux interrogeant l’impact environnemental de ces activités. Au-delà du seul port, on constate des impacts environnementaux qui dépassent son propre espace physique :

 

  • Ces mêmes activités portuaires ont contribué à remodeler l’hinterland pour permettre d’acheminer sur un territoire des ressources. La création de routes, de chemins de fer ou d’entrepôts sont autant d’occasion d’interroger l’impact environnemental.

 

  • Les activités portuaires ont entraîné l’implantation d’usines souvent polluantes qui venaient bénéficier du port pour se fournir ou au contraire pour exporter la production. Ces implantations ont également des impacts humains du fait du besoin de main-d’œuvre et de la transformation de l’environnement et de l’habitat qui en résultent.

 

  • Les activités liées à la colonisation ont largement transité par les ports. Par l’impact qu’elles ont eu sur des espaces lointains (transformation des cultures notamment, déplacement forcé ou non des populations) eux-mêmes souvent en zone littorale, elles interrogent le lien entre un capitalisme du Nord et un impact environnemental au Sud (Buckharin 1929, Brotton 1977, Brockway 1978, Cogneau 2023). Le rôle des sociétés concessionnaires créées dans les colonies ou d’entreprises prospérant sur ce commerce peut être ici interrogé.

 

  • Les activités touristiques : des travaux comme ceux de Boyer (1996, 1999), de Zuelow et James (2022) ou de Cousin et Réau (2006) ont contribué à montrer comment des espaces sont devenus des lieux attractifs en fonction d’une histoire socio-culturelle. Il manque cependant des travaux qui interrogent le lien entre le développement d’entreprises de tourisme et leurs effets sur l’environnement.

 

-        En interrogeant la responsabilité de dispositifs de gestion sur l’environnement. Le développement du capitalisme a contribué à faire apparaître une variété d’outils de gestion favorisant une accumulation de profit : calcul de coût, outils de choix d’investissement, publicité, études de marché, etc. Des travaux (Labardin et alii, 2024, Rémy et alii, 2024, Dekhili et alii, 2024) commencent à documenter comment le développement de ces outils a contribué à la destruction de l’environnement.

 

Bibliographie indicative

Allen, R. C. (2011). Global economic history: A very short introduction. Oxford, Oxford University Press.

Altvater, E. (2006). “The Social and Natural Environment of Fossil Capitalism,” in L. Panitch & C. Leys, eds., Coming to Terms with Nature. Londres, Merlin Press.

Bartolotti, F., Daumalin, X., Raveux, O. (Eds.). (2022). L'histoire portuaire marseillaise en chantier : Espaces, fonctions et représentations. Marseille, Presses universitaires de Provence.

Bonneuil, C., Fressoz, J.-B. (2013). L’événement anthropocène : la Terre, l’histoire et nous. Paris, Le Seuil.

Boyer, M. (1996). Histoire de l'invention du tourisme (XVI-XIXe siècles) : Origine et développement du tourisme dans le Sud-est de la France. Paris, L’Aube essai.

Boyer, M. (1999). Histoire du tourisme de masse. Paris, Que sais-je ?

Brotton, J. (1997). Trading Territories: Mapping the early modern world. Ithaca, Cornell University Press.

Bukharin, N. (1929 [1917]). Imperialism and World Economy. New York, International Publishers.

Bunker, S.G., Ciccantell, P.S. (2005). Globalization and the Race for Resources. Baltimore, Johns Hopkins University Press.

Burkett, P. (1999). Marx and Nature. New York, St. Martin’s Press.

Caffentzis, G. (2013 [1980]). “The Work/Energy Crisis and the Apocalypse,” in In Letters of Blood and Fire: Work, Machines, and the Crisis of Capitalism. Oakland, PM Press, p.11-57

Cogneau, D. (2023). Un empire bon marché : histoire et économie politique de la colonisation française, XIXe-XXIe siècle. Paris, Le Seuil.

Cousin, S., Réau, B. (2006). Sociologie du tourisme. Paris, La Découverte.

Dekhili, S., Merle, A., Ochs, A. (2024). Commentaire sur « Look up! Cinq propositions de recherche pour repenser le marketing dans une société post-croissance », Recherche et Applications en Marketing, 39(2), p.119-134.

Eck, J. F., Tilly, P., Touchelay, B. (Eds.). (2016). Espaces portuaires : L’Europe du Nord à l’interface des économies et des cultures 19e-20e siècle. Lille, Presses universitaires du Septentrion.

François, P., Lemercier, C. (2021). Sociologie historique du capitalisme, Paris, La Découverte.

Frioux, S., Bécot, R. (Eds.). (2022). Écrire l’histoire environnementale au XXIe siècle : Sources, méthodes, pratiques. Rennes, Presses universitaires de Rennes.

Labardin, P., Loizeau, J., Fabre, A. Boyer, C. (2024), « L’hévéa qui gâche la forêt. Ce que la circulation des prix de revient fait à la forêt coloniale », Revue Française de Gestion, vol. 315, no. 2, 2024, p.143-164.

Marnot, B. (2011). Les grands ports de commerce français et la mondialisation au XIXe siècle, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne.

Moore J.W. (2017). “The Capitalocene Part I: On the Nature & Origins of Our Ecological Crisis”, Journal of Peasant Studies, 44, p.594‑630.

Rémy, E., Roux, D., Arnould, E., Askegaard, S., Beudaert, A., Galluzzo, A., Giannelloni, J.-L., Marion, G. (2024). « Look up! Cinq propositions de recherche pour repenser le marketing dans une société post-croissance », Recherche et Applications en Marketing, 39(1), p.78-100.

Weissenbacher, M. (2009). Sources of power: How energy forges human history. New York, Praeger.

Worster, D. (1990). “Transformations of the Earth”, Journal of American History 76(4), p.1087-1106.

Zuelow, E.G.E., James, K.J. (2022). The Oxford Handbook of the History of Tourism and Travel. Oxford, Oxford University Press.

Coordination du numéro spécial d’Entreprises et Histoire

Pierre Labardin (La Rochelle Université)

Eve Lamendour (La Rochelle Université)

Bruno Marnot (La Rochelle Université)

Soumaya El Hayek Sfeir (Excelia Business School)

Rose Toki (La Rochelle Université)

Dates à retenir
Date limite de soumission des articles : 28 février 2025
Décision du comité éditorial : 21 mars 2025
Version définitive et complétée des textes : 18 avril 2025

Normes

Les articles rédigés en français ou en anglais seront évalués à l’aveugle par deux rapporteurs. La longueur des articles est comprise entre 30 000 et 45 000 signes.

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